2 mai 2008 5 02 /05 /mai /2008 09:21
Que se cache-t-il derrière les questions techniques ?

    Nous avons récemment vu les difficultés politiques que le gouvernement pouvait rencontrer à vouloir renforcer le dispositif militaire en Afghanistan. Ces difficultés – un débat houleux, un sondage défavorable et le dépôt d’une motion de censure par l’opposition socialiste – sont malheureusement renforcées par les limites techniques et tactiques de nos capacités militaires. C’est ce que révèle un article du journaliste Jean-Dominique Merchet.

Le Super Étendard de la firme Dassault aviation date des années 1970

    Alors que la France s’apprête à engager 3 avions
Super Étendard modernisés (SEM) de la 17 F à partir du mois de juin, le journaliste de Libération – s’appuyant sur les propos d’un connaisseur – se demande dans quelle mesure cet engagement n’est pas davantage un effet d’annonce plutôt qu’un réel coup de main donné à nos alliés. Pour cela, il part de la fiche technique du SEM et il montre que ce type d’avion est inapproprié aux missions que l’on va lui demander.

    Sans vouloir entrer dans des propos trop techniques, il faut comprendre qu’un avion qui part en mission est l’objet d’un compromis entre le carburant et l’armement à emporter. Ce compromis étant rapporté à la puissance de sa motorisation. Soit l’avion devra aller loin ou rester plus longtemps en vol, et il devra emporter plus de carburant au détriment de l’armement, donc au détriment des missions d’attaque ou de défense. Soit il privilégiera une mission d’attaque (appui au sol par exemple) ce qui lui fera emporter plus de bombes et moins de carburant…

    Si l’on fait ce bilan pour le SEM, et si l’on tient compte des conditions du théâtre afghan (1), soit l’avion emportera une seule bombe de 250 kg GBU 12 (2), soit il emportera un pod de désignation Damoclès (3). La couverture aérienne que les SEM fourniraient aux troupes au sol serait dérisoire, surtout lorsque l’on connaît les capacités des avions américains actuellement déployés en Afghanistan. Le
Fairchild A 10 Thunderbolt II Warthog, à lui seul, dispose de 11 points d’ancrage sous les ailes et le fuselage, lui permettant d’emporter 2 GBU de 250 kg, 14 roquettes et 1 canon Gatling alimenté de 1200 obus de 30 mm… Le McDonnell Douglas F-15 Eagle décollerait de Kandahar avec 8 JDAM.

Deux générations de chasseurs en formation: au premier plan deux Rafales, au second plan 3 SEM

    En d’autres termes, un F 15 américain accomplirait en une seule sortie la mission de 8 de nos SEM… Seul l’engagement d’avions
Rafale à la place des SEM, à Kandahar, pourrait permettre de rééquilibrer ce rapport qui fait douter sérieusement de l'efficacité de notre engagement auprès de nos alliés. Mais il semblerait que de sourdes querelles entre la Marine et l’Armée de l’Air conduisent à cette situation, sans même parler de la grande difficulté à sécuriser et ravitailler la base de Kandahar.

    Dans le même temps, la formation de nos pilotes de l’aéronavale - en l’absence d’un deuxième porte-avions - est soutenue par nos alliés américains. En juillet prochain, 6 Rafale de la
12 F et 2 Hawkeye de la 4 F iront à Norfolk (Virginie) où ils s’entraîneront à bord du porte-avions nucléaire USS Theodore Roosevelt CVN 71 (classe Nimitz). Ils seront intégrés au grand exercice annuel de l’US Navy JTFEX (Joint Task Force Exercice). Pilotes et avions seront accompagnés de leurs équipes de maintenance et testeront, à cette occasion, l’interopérabilité logistique avec les marins américains.

Le 12 avril 2007, dans le Golfe Persique, un Rafale du porte-avions Charles de Gaulle effectue un touch-and-go sur le USS John C. Stennis CVN 74. Le touch-and-go est une manoeuvre qui consiste, pour le pilote, à toucher le pont d'envol du porte-avions et à remettre la pleine puissance des réacteurs afin de redécoller. La manoeuvre est visible au début du film "Top Gun" de Tony Scott (1986). Les avions à droite sont desMcDonnell Douglas F 18 Hornet

(1) La base de Kandahar, au Sud de l’Afghanistan, d’où opèreront les SEM (et 3 Mirage 2000 D) est à 1000 m d’altitude. Il y fera 30° à partir du mois de juin.
(2) Les Guided Bomb Unit (GBU) sont des bombes à guidage laser. On trouvera aussi l’acronyme Joint Direct Attack Munition (JDAM) pour des bombes plus conventionnelles sur lesquelles sont adaptées des capteurs laser. Le concept de munitions guidées est mis au point durant la guerre du Vietnam (bombes Paveway et Walleye).
(3) Développé par la firme
THALES, le pod Damoclès est un désignateur laser de 3e génération qui permet à un avion de verrouiller une bombe ou un missile sur une cible.
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